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Au chat qui pète
15 février 2008

Là haut...

Il devait être quelque chose comme huit heures trente ce matin là quand on est monté dans la voiture. Six beaux mâles en pleine force de l'âge, gros godillots aux pieds, pantalon et blouson de cosmonaute des neiges. Mis à part le conducteur qui chantonnait, c'était le silence dans la voiture. Un peu d'appréhension ?

On trouve gros 4x4 et sa remorque à l'endroit prévu. On se salue, et la grimpette commence. A 1.300 m, la neige nous bloque. Il est temps d'y aller. On file un coup de main à la dame au 4x4 pour décharger. Puis on prépare le matos, on charge, on écoute les consignes, et on libère la meute.

coucher_de_soleil

Il est environ 18h45 lorsque je prends cette photo. Nous sommes à 2.000 m environ et nous nous apprêtons à passer notre première nuit en refuge.  Devant nous le soleil offre un spectacle grandiose, la neige est bleuté, le ciel de feu, et nos jambes fourbues. Je ne sais pas encore si je dois être heureux d'être là ou pas.

Derrière nous, attaché à la chaîne solidement ancrée dans la neige, 31 paires d'yeux et d'oreilles sont braqués vers nous, ou plus exactement sur la patronne, la musher, notre guide, notre bonne maman, celle qui va nous permettre de passer une des semaines les plus extraordinaire de notre vie.

Initialement, on devait se balader sur les plateaux du Vercors. Plateaux, ça veut dire plat. Pour les montagnards de canapé que nous sommes, c'était déjà un exploit rien que d'y penser. La veille du départ, coup de fil : pas de neige, pas de bol, faut grimper... Direction la Savoie. Les plateaux savoyards ont la curieuse caractéristique d'être fortement pentus. Faut le savoir. On ne pouvait plus reculer, et puis, merde, on est des warriors nous, non ?

Retour en bas, le matin...
- C'est à qui Titane et Ushia ?
- A moi m'dame !
- Tiens, tu les prends par le collier sans geste brusque et tu les mets à la chaîne.
- OK !

J'attrape les deux colliers à pleine main. Ushia se retourne, un peu inquiète de ce grand machin qu'elle ne connaît pas. Titane, elle, s'en fout. C'est une dominante non ? Les deux chiens démarrent comme des fusées. Ils sont dans leur boite sur la remorque depuis deux heures et ils en ont marre. J'ai toute les peines du monde à ne pas finir à plat ventre trainé par ces deux canidés cinglés !

- Celui là, tu fais gaffe, c'est Archi. Il est sympa comme tout mais quand il tire, il tire. Prend le tout seul et tiens le bien ! Tu viendras chercher Brahmane tout à l'heure.

archi

Archi... A ce moment là, je ne savais pas encore non plus qu'Archi allait tant me chambouler. Je ne me doutais pas non plus que je pouvais être chamboulé par un chien.

La première journée, fallait monter là haut, là haut, là haut. Et comme on trimballait la bouffe pour cinq jours, sept adultes et trente et un chiens, l'équipement, la vaisselle, et des tas de bidules inconnus pour nous, les traineaux étaient lourds. Alors on a poussé. D'abord sur un chemin, puis dans la poudreuse, de la neige jusqu'aux cuisses. Parfois on pouvait glisser un peu sur un faux plat, mais ça durait pas.

Crevé le Chat ? Pire. Détruit !

Le problème avec les plateaux savoyards, c'est qu'ils sont pentus, mais qu'ils possèdent également un sommet, suivi immédiatement d'une descente. C'est l'expérience que nous avons faite le lendemain. Debout les deux pieds sur le frein, on essaye de glisser sans tomber ni rattraper les chiens. Certes, c'est rigolo... dans la poudreuse.

Ce qui est moins drôle c'est quand on perd le contrôle du traîneau. Déjà qu'on n'avait pas le contrôle des chiens (ou si peu), on se sent vite seul. Heureusement, ça dure rarement plus de quelques secondes... avant la gamelle. Pas lâcher le traîneau ! C'est la consigne, sinon il se barre avec les affaires, la bouffe, il peut tomber dans un dévers, entrainer ou blesser les chiens ou quelqu'un se trouvant devant. Alors à plat ventre accroché au guidon, on gueule STOOOOOOOP ! à ces enfoirés de chiens qui continuent à courir pendant qu'on essaye désespérément de redresser l'engin renversé pour remonter dessus et freiner.

Alors le soir, après avoir nourri ces braves chiens, on s'écroulait à table. Notre guide nous préparait un petit plat remontant (tartiflette, crozets au beaufort, ravioles etc...) arrosé d'un coup de jaja, et à vingt et une heures : dodo. On demandait pas notre reste. Une belle assemblée de ronfleurs allongés sur des matelas au sol qui n'ouvraient l'oeil qu'avec difficulté à 8 h le lendemain.

A force de pelles et gamelles en tout genre, on a finit par acquérir une certaine technique. Alors on se risquait à d'autres jeux comme descendre une piste de fond damée. Très amusant dans les lignes droites, très technique dans les virages en épingle où il faut faire déraper le traîneau genre Starsky et Hutch si on ne veut pas finir dans le talus. Ca c'est dans la théorie, parce que le talus on finit toujours dedans. Et ce qui est le plus vexant c'est quand on arrive à arrêter ses chiens, qu'on remet un peu d'ordre dans le matériel et qu'on s'aperçoit que les quatre chiens nous regardent l'air de dire : bon, oh, tu te magnes un peu là ? D'ailleurs, à peine esquissé le geste de poser un pied sur les patins, les quatre dingos se mettent à tirer d'un seul coup nous arrachant des jurons qu'on ne pensait même pas connaître.

Je suis rentré pas trop cassé. Un peu abimé certes, sentant le chien et la vieille chaussette, avec une barbe de bagnard et le cheveu collé. J'ai découvert le regard profond et sage d'Archi, le poids de sa tête sur mon bras, sa puissance, sa douceur et sa docilité. J'ai versé une larme en le remettant dans sa boite sur la remorque, saleté de chien va !

J'ai aussi laissé quelque chose là-haut sur la montagne. Un peu comme une vieille peau, une défroque de quelque chose. En rentrant j'ai confirmé mon inscription à ma formation, j'ai prévenu mon employeur que je passais mes derniers mois chez eux. C'est là-haut, blotti dans mon duvet que j'ai repoussé les derniers doutes et pris ma décision.

Finalement, c'est chouette aussi les chiens...

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Commentaires
C
Ouh ouh !! la chat ?? Tu redescends ?
L
moi je retiens que les chats sont toujours aussi surprenants...
M
Je suis contente que tu aies fait cette expérience avec les chiens de traîneau qui ont bercé toute mon enfance (quand on a un éleveur dans la famille, ça aide..) : ils sont au delà du "chien", ils méritent le respect.
C
Archi-chouette, même...
C
Ah, quand même !! J'avais les crocs !
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