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Au chat qui pète

18 décembre 2008

De l'hiver, des chats, des lamas, et du reste

Vous avez du remarquer aussi, mais c'est l'hiver... D'ailleurs j'en parlais l'autre jour à mon géranium (le même que l'an dernier), trois ans avec un hiver trop doux, ça peut pas durer.

Et d'ailleurs c'est tant mieux. Un vrai hiver, de la neige, des doigts gelés, des nez rouges à niflette incorporée, des buches dans la cheminée et des gens sympas pour papoter, j'en rêve presque...

L'hiver est un passage. Nous changeons d'année, les vins de millésime, les arbres de feuilles, les enfants de taille de manteau, et les chats de pelage... Les chats font en effet partie des espèces chez qui des trucs poussent l'hiver et tombent au printemps, de préférence sur ma veste foncée...

Et bien le Chat, lui c'est des ailes qui lui poussent. Des grandes ailes de Chat doublées angora...

lama

Mon nouveau métier me donne des ailes - mes clients y sont pour beaucoup - j'ai énormément de choses à faire, et je m'éclate. Et quand je regarde ce blog, je me dis qu'il ne me correspond plus. La preuve c'est que j'ai adoré y écrire et qu'aujourd'hui je n'y viens quasi plus. Je n'ai plus envie d'être le Chat, mais d'être moi, pour être un peu plus là.

Ce blog s'arrête là. Juste là.

Belle vie à vous.

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9 décembre 2008

Vous avez quelque chose à fêter ?

Il y a à peu près deux siècles, il se passait ça dans ma vie.

Je dis deux siècles, parce qu'à peine un peu plus d'un an depuis cette date tout à changé. Et même pour un Chat dopé à l'optimisme au point que ça confine parfois à l'intégrisme, je n'en reviens pas. Samedi dernier j'ai livré au jury le résultat de mes neuf mois de travail. Plus exactement, quelques minutes avant la soutenance j'ai jeté mes notes et ma manie de bien faire et j'ai présenté non pas mon travail mais ce que mon travail m'a permis de devenir : moi, moi et seulement moi, mais partout moi, même dans mon métier !

callia


Alors oui, j'ai un truc à fêter. Depuis samedi soir, je suis coach professionnel certifié. Depuis samedi mon métier c'est d'accompagner des personnes dans la réalisation de leurs projets. Depuis samedi mon vrai métier c'est d'être dans ma profession ce que je suis fondamentalement : quelqu'un qui aime les autres et qui tire une grande partie de sa raison d'être de leur réalisation.

Je vous souhaite un beau et long chemin à tous. A votre santé !

19 novembre 2008

Sur un air de tango

La première chose qui manque, c'est la lumière. La lumière du printemps chaud - très chaud - qui bat son plein là-bas. Ensuite il manque la chaleur, pas celle de l'atmosphère, celle des gens... Il y a  par exemple cette vieille dame pomponnée, bijoutée, fardée, avec ses grosses lunettes d'avant la crise. Je suis en train de photographier un bâtiment - un ancien bar-tango qui deviendra peut-être une librairie. Elle s'arrête près de moi et me dit quelque chose. Nous sommes à Buenos Aires depuis peu de temps, pas assez pour que mes lointains souvenirs d'espagnol ne soient remontés à la surface, ni que mon oreille ne se soit faite à l'accent argentin. Devant mon air confus elle me demande d'où je viens et à la réponse deux grosses larmes se mettent à couler sur son visage. Dans un français parfait elle m'explique : "La France, quel merveilleux pays. J'ai fait mes études à la Sorbonne, c'était après la guerre, j'y suis resté cinq ans. C'étaient les plus belles années de ma vie. Quelle chance vous avez d'habiter là-bas... Votre pays est magnifique et si accueillant !"

Je n'ai pas de mots pour dire ce que je ressens là-bas. Juste des images, des sons, des sensations, des émotions. Les Argentins ne consomment pas - ou plutôt, n'ont pas ou plus les moyens de consommer, alors ils vivent. C'est peut-être leur authenticité qui me chamboule, cette manière qu'ils ont d'accueillir, d'être curieux, d'être simplement eux. Ils sont animés d'une espèce de nonchalance active, doublé d'un certain fatalisme qui les fait vivre au présent, goûter le présent et le savourer lorsque c'est possible. Ils sont dignes et sensibles et savent dire qu'ils aiment sans effusion. Naturellement.

L'Argentine n'est qu'un contraste, une suite de contrastes, un enchevêtrement de contrastes. Une nature exubérante, gigantesque, phénoménale. Des plaines quasi désertiques sur des centaines de kilomètres, des montagnes majestueuses, des hauts plateaux, les abords du cercle polaire au sud, la forêt tropicale au nord, une faune formidablement variée, des villes champignons poussées au milieu de nulle part, une capitale titanesque, une histoire de mélange, de soubresauts.

Trois semaines, 3.000 km de bus, 23.000 km d'avion, 1.200 photos, et nous n'avons rien vu, juste butiné une baleine par ci, un toucan par là, un Malbec de San Juan, des chutes d'eaux monstrueuses et magnifiques. Nous avons passé du temps à Buenos Aires avec notre amie, elle aime sa ville, elle aime la montrer, l'expliquer, la faire visiter. Elle nous a aussi parlé de la vie là-bas. Difficile, incertaine, mais à nos yeux tellement moins artificielle...

clown_triste

J'étais triste en quittant Buenos Aires, triste de partir si loin, d'avoir eu trop peu de temps pour partager un peu plus de cette ville monstrueuse et pourtant tellement humaine. Et comme cette dame qui aime tant la France, moi je me sens bien dans son si généreux pays.

21 octobre 2008

Dans une semaine...

Dans une semaine pile poil maintenant, je serai en train de terminer mon petit déj... 11h30, pour un petit déj, ça sent la grasse mat', non ? Nuit blanche prévue ? Presque, enfin, pas une nuit tout à fait confortable, mais une nuit exceptionnelle, quand même.

Dans une semaine, je risque d'avoir les jambes douloureuses, ou engourdies. Dans une semaine j'aurai la barbe qui picote, le cheveux un peu collant et les yeux un peu petits-pas-bien-ouverts...

Pas loin il y aura Petite Fleur. A cette heure là, elle sera certainement en plein en train de faire cours à ses poupées, à moins qu'elle ne réussisse à se tenir tranquille en écoutant une histoire. A coté encore il y aura Chère et Tendre, à peu près dans le même état que moi, la barbe en moins.

Et à coté encore il y aura plein d'autres gens. Plusieurs dizaines. Des barbus, des poilus, des sans poils, des grands, des petits, jeunes ou moins jeunes, hommes, femmes, enfants... Tous le cheveux collant, l'oeil pas net, mais globalement contents.

Dehors il fera beau. Si si, c'est sûr, il fait toujours beau là-bas. Faut dire qu'à un peu plus de 10.000 mètres d'altitude il y a rarement des nuages. Il sera un peu plus de six heures du mat locale, et si on a la chance d'avoir un hublot, on pourra voir se lever le soleil local sur la forêt tropicale en dessous. Je dis soleil local car ce n'est pas le même que le notre. Là-bas il est plein nord à midi, et au printemps en novembre on dépasse souvent les 25°.

Encore deux heures environ - ça dépendra des vents au dessus de l'Atlantique - et le 777 posera ses délicates roues sur la piste de l'aéroport d'Ezeiza, province de Buenos Aires. Dans le hall il y aura une tête connue, notre copine australe qui nous hébergera la première nuit.

Le lendemain nous lui laisserons une partie de nos bagages, étant entendu que San Telmo sera le barycentre de notre voyage, et nous repartirons vers l'aéroport pour essayer d'embarquer sur un vol local vers l'une ou l'autre de nos destinations. Au nord, au sud, un peu à l'ouest, on verra bien sur quel vol il restera de la place... Nous n'avons rien réservé, ni vol, ni hôtel... Presque trois semaines à nous promener sans planning dans ce gigantesque pays, au hasard des rencontres, des humeurs et des remplissages d'avion ou d'autocars. Pour Petite Fleur ce sera là son premier voyage (si on excepte le retour de Katmandou), sa première transatlantique, son premier passage d'équateur et son premier séjour dans ce pays que nous aimons tant.

Ca y est, c'est dans une semaine, j'en suis presque surpris... Depuis le temps que nous attendions d'y retourner...

15 octobre 2008

Il y a longtemps non ???

... que je ne vous ai pas donné de nouvelles de Petite Fleur ?

Il y a un an, la mini-Miss prenait possession de ses nouveaux appartements Mâconnais. Elle a un peu souffert de notre départ de Lyon puis s'est vite acclimatée à son nouvel environnement, sa nouvelle école, nouvelle baby-sitter, nouvelles copines et tout et tout...

Nous avons commencé à sentir le changement vers le mois de décembre, tout doucement... D'abord par la maîtresse qui nous a signalé avec un grand sourire que Petite fleur n'était plus la petite fille bien sage du début de l'année. Puis nous avons constaté quelques provocations gentilles, des petites désobéissances, des petits tests, pour voir... Nous avons observé tout ça, avec intérêt et amusement...

Elle devenait une petite fille comme les autres...

PF_LYS

C'est un sentiment confus, quelque chose de ténu qui s'est joué en quelques semaines. Nous la sentions plus libre, et nous même nous sentions notre propre changement. Nous situons la prise de conscience de ce changement vers janvier. Nous ne sentions plus chez elle ce besoin viscéral de plaire. Elle s'affirmait doucement, vérifiait que même si elle nous mettait parfois en colère nous restions là, toujours là. De notre coté elle était installée dans nos vies. Ce n'était plus une petite fille qui habitait avec nous mais notre fille. Je ne voyais plus sa différence, un peu comme si elle avait toujours été là. L'adoption, le voyage, la rencontre, tout cela est devenu progressivement quelque chose d'anecdotique dans notre quotidien.

On ne le dira jamais assez, ce n'est pas nous qui avons adopté cette petite fille, c'est nous trois qui avons du faire ce chemin de l'adoption. Evoluer chacun dans la reconnaissance de l'autre, dans l'acceptation de ce qu'il est, sans essayer de le changer. Petite Fleur est arrivée avec une histoire, un passé, d'autres parents, une autre vie d'avant. Elle n'a pas été notre bébé, elle s'est construite dans un autre moule. Tellement différent. Elle a fait des concessions, accepté de désapprendre certaines choses, nous avons accepté ses besoins et avons construit ensemble une nouvelle famille. Nous nous sommes tous adoptés.

Aujourd'hui Petite Fleur est espiègle, toujours le sourire aux lèvres, parfois des accès de colère, des blagues, beaucoup de rires. Elle sait que nous l'aimons, nous savons qu'elle nous aime. Parfois des grosses bulles d'angoisse de sa vie d'avant remontent et sortent en chagrin, de gros chagrins qui nettoient. Puis son grand sourire revient après quelques gros bisous et elle reprend sa course, dévore sa vie et nous étonne un peu plus tous les jours.

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8 octobre 2008

Mééééééééééouh ?

Purée, quelle sieste !

Non, le Chat n'est pas parti planter ses choux ailleurs. Non le Chat n'a pas abandonné son blog. Non le Chat ne s'est pas barré vers d'autres cieux en abandonnant ses si gentils lecteurs - enfin - si gentilles lectrices essentiellement !

Ne vous inquiétez pas, quand je ferme un blog, je préviens avant !

D'abord merci pour ce déferlement de commentaires sur ma précédente note. Enfin, déferlement... en cinq mois ça fait pas lourd de la journée hein ? Mais merci, quand même, pour vos encouragements et pour ce que vous écrivez. Ca me touche, vraiment, vraiment...

Il est où le Chat ? Toujours à Mâcon. Toujours avec des projets de voyage (non Morena ne hurle pas !), enfin un peu plus que des projets... Depuis maintenant cinq mois je me forme, je travaille à mon nouveau métier, je rédige un mémoire (rhâââââ !), je reprends des études, et accessoirement... je vis.

Je vis tellement d'ailleurs que je n'ai plus le temps d'écrire. C'est vous dire combien je m'ennuyais avant ! Vous savez pas quoi ? Je revole ! Il y avait tellement longtemps que je n'avais pas touché un manche que j'avais oublié comment c'était beau de la haut... Et avec notre hiver précoce, les couleurs sont magnifiques. J'ai même repris la course à pied avec l'objectif de faire un temps sympa au 10 km de Lyon fin avril.

Bref plein de projets, quelques clients, une sixième vie plutôt agréable, une famille rigolote... On a vu pire.

Et je suis content de cet équilibre. J'ai mis du temps, beaucoup de temps à le mettre en place, mais ça en vallait la peine. Et ce qui me plait aussi aujourd'hui, c'est que je fais profession d'aider les gens à trouver leur bonheur à eux.

Je vous embrasse... je reviens avant cinq mois, promis...

5 mai 2008

Et de six...

Le 6 juin 1988 j'entrais en informatique comme on entre en religion. La faute à mes dix-huit ans qui - quelques années avant - m'avaient fait découvrir le nec plus ultra de la techno de l'époque : la première calculatrice programmable censée m'aider à passer mon bac. Je ne sais pas quelle fut son aide réelle à ce sujet, mais toujours est-il que j'ai oublié mes envies d'architecture ou d'électronique (mes choix potentiels d'avenir de l'époque) pour me jeter à corps perdu dans cette discipline nouvelle où tout était à inventer : l'informatique. 

A l'époque peu de monde savait ce qu'était réellement un ordinateur. On savait juste que c'était très cher, très compliqué, mais on n'en voyait pas l'utilité réelle. Il y avait bien quelques hurluberlus qui prédisaient que chacun aurait son ordinateur personnel dans un avenir proche. Les sots ! Et à quoi ça servirait, hein ? 

Le 5 mai 2008, je remets dignement mon badge et mon téléphone professionnel à la DRH. Je commence la tournée des bureaux ; alors, c'est vrai, tu t'en vas ? Quand ? Là ? Maintenant ? Et tu as trouvé quelque chose d'autre ? 

Oh oui, j'ai trouvé quelque chose d'autre. 19 ans et 11 mois après avoir garé ma deuche sur le parking de ce qui ne s'appelait pas encore une start-up, je rends mon habit d’informaticien pour en endosser un autre. J’arrête de travailler avec les machines et je commence à travailler avec des humains. J’arrête les procédures, les méthodologies, les points projets, les mises en prod, les maintenances, TMA et autres PMO, sans compter les DRP, RFP et RFI. Les kick off meetings, les slides, les drafts et autres budgets forecasts, les policy waivers, les work requests, les cases et autre roolback dead lines. 

A partir de demain, je parle humain, avec des humains. A partir de demain mes projets seront ceux de mes clients, que j’accompagnerai dans leur réalisation. A partir de demain mon métier c’est d’aider mes contemporains à faire des choix avec confiance et en conscience. A partir de demain je ne dirai plus : « il me faut un draft du diagramme des flux pour vérifier la compatibilité avec les prérequis de sécurité » mais « en quoi puis-je vous être utile ? ». 

Et le nœud du problème est là : l’utilité. Lorsque le soir en me couchant je suis incapable de définir en quoi j’ai apporté quelque chose à quelqu’un dans ma journée, et que demain ne verra pas d’amélioration de ce coté là, j’angoisse. Lorsque la seule utilité de mon travail est de me rapporter de l’argent, je déprime. Lorsque l’idée que je suis obligé de faire ça 20 ans encore m’assaille, je panique. Alors que permettre à quelqu’un de prendre le chemin de réaliser un objectif, un projet, un rêve, ça a du sens pour moi, ça donne du sens, ça me remplit. 

Cerise sur le cadeau : à partir de demain je ne suis plus salarié. Je suis mon chef, responsable de mes réussites et de mes échecs. Libre, responsable… et heureux ! 

Voilà, ça y est, la sixième vie du Chat commence…

28 mars 2008

Quand les fleurs papotent

Petite Fleur est assise en tailleur près de la table basse, l'air concentré. Devant elle, le lecteur CD qu'elle écoute attentivement, sérieusement : "pourquoi il veut qu'on dessine un mouton ?"

Elle est sur les genoux de sa maman, un peu inquiète, je suis à coté. Face à nous de l'autre coté de la table deux hommes et une femme, l'air sérieux. A gauche à l'extrémité de la table, un autre homme, plus jeune, avec un beau sourire. A droite, une femme, le visage neutre. Nous ne sommes pas bien à l'aise, ce doit être ça que ressent Petite Fleur. Celui du milieu des trois d'en face parle et nous pose des questions. J'ai la gorge nouée, je n'arrive pas à articuler. Au bout d'un moment il se tait, c'est celui de gauche qui prend la parole. Seuls ses derniers mots résonnent dans ma tête : " l'adoption au Népal est une adoption simple, mais en vertu de l'article machin chose, je demande au tribunal que l'adoption plénière soit prononcée … ". Et l'autre de reprendre : " Pas de questions ou de remarques ? Le prononcé aura lieu le 21 avril, l'audience est terminée, merci ". Petite fleur, en chuchotant : " Papa, Papa, pourquoi ils ont des robes noires les monsieurs ? "

-    Papa ? Qu'est ce que tu fais ?
-    Je réserve des billets d'avion.
-    Ah oui ? Pour aller où ?
-    Pour aller voir les kangourous…
-    Les kangourous ? C'est vrai maman ?
-    Mais non ma chérie, Papa il raconte des bêtises…
-    Ahlala, ce Papa ! C'est pour où les billets ?
-    C'est pour aller voir les éléphants…
-    Maman ! Papa il dit que des mensonges !
-    Non, non, on va bien aller voir des éléphants, mais des éléphants de mer…
-    Ah bon ?
-    Oui, puis des baleines aussi…
-    C'est vrai Maman ?
-    Et puis des manchots, comme dans la marche de l'empereur…
-    Maman ? C'est vrai ce qu'il dit Papa ?
-    Oui ma chérie, c'est vrai…
-    Et on y va tous les trois ?
-    Oui, tous les trois.
-    Mais les baleines elles vont nous manger !
-    Mais non, tu vas voir celles là elles sont gentilles…

(C'était juste pour donner des nouvelles... quelques gros dossiers sur le bureau : début de formation la semaine prochaine, fort risque de licenciement d'ici quelques semaines - c'est prématuré mais on va voir ce qu'on peut faire, reprise des travaux dans l'ermitage. Sinon, ça roule. Ca roule plutôt bien... A bientôt)

15 février 2008

Là haut...

Il devait être quelque chose comme huit heures trente ce matin là quand on est monté dans la voiture. Six beaux mâles en pleine force de l'âge, gros godillots aux pieds, pantalon et blouson de cosmonaute des neiges. Mis à part le conducteur qui chantonnait, c'était le silence dans la voiture. Un peu d'appréhension ?

On trouve gros 4x4 et sa remorque à l'endroit prévu. On se salue, et la grimpette commence. A 1.300 m, la neige nous bloque. Il est temps d'y aller. On file un coup de main à la dame au 4x4 pour décharger. Puis on prépare le matos, on charge, on écoute les consignes, et on libère la meute.

coucher_de_soleil

Il est environ 18h45 lorsque je prends cette photo. Nous sommes à 2.000 m environ et nous nous apprêtons à passer notre première nuit en refuge.  Devant nous le soleil offre un spectacle grandiose, la neige est bleuté, le ciel de feu, et nos jambes fourbues. Je ne sais pas encore si je dois être heureux d'être là ou pas.

Derrière nous, attaché à la chaîne solidement ancrée dans la neige, 31 paires d'yeux et d'oreilles sont braqués vers nous, ou plus exactement sur la patronne, la musher, notre guide, notre bonne maman, celle qui va nous permettre de passer une des semaines les plus extraordinaire de notre vie.

Initialement, on devait se balader sur les plateaux du Vercors. Plateaux, ça veut dire plat. Pour les montagnards de canapé que nous sommes, c'était déjà un exploit rien que d'y penser. La veille du départ, coup de fil : pas de neige, pas de bol, faut grimper... Direction la Savoie. Les plateaux savoyards ont la curieuse caractéristique d'être fortement pentus. Faut le savoir. On ne pouvait plus reculer, et puis, merde, on est des warriors nous, non ?

Retour en bas, le matin...
- C'est à qui Titane et Ushia ?
- A moi m'dame !
- Tiens, tu les prends par le collier sans geste brusque et tu les mets à la chaîne.
- OK !

J'attrape les deux colliers à pleine main. Ushia se retourne, un peu inquiète de ce grand machin qu'elle ne connaît pas. Titane, elle, s'en fout. C'est une dominante non ? Les deux chiens démarrent comme des fusées. Ils sont dans leur boite sur la remorque depuis deux heures et ils en ont marre. J'ai toute les peines du monde à ne pas finir à plat ventre trainé par ces deux canidés cinglés !

- Celui là, tu fais gaffe, c'est Archi. Il est sympa comme tout mais quand il tire, il tire. Prend le tout seul et tiens le bien ! Tu viendras chercher Brahmane tout à l'heure.

archi

Archi... A ce moment là, je ne savais pas encore non plus qu'Archi allait tant me chambouler. Je ne me doutais pas non plus que je pouvais être chamboulé par un chien.

La première journée, fallait monter là haut, là haut, là haut. Et comme on trimballait la bouffe pour cinq jours, sept adultes et trente et un chiens, l'équipement, la vaisselle, et des tas de bidules inconnus pour nous, les traineaux étaient lourds. Alors on a poussé. D'abord sur un chemin, puis dans la poudreuse, de la neige jusqu'aux cuisses. Parfois on pouvait glisser un peu sur un faux plat, mais ça durait pas.

Crevé le Chat ? Pire. Détruit !

Le problème avec les plateaux savoyards, c'est qu'ils sont pentus, mais qu'ils possèdent également un sommet, suivi immédiatement d'une descente. C'est l'expérience que nous avons faite le lendemain. Debout les deux pieds sur le frein, on essaye de glisser sans tomber ni rattraper les chiens. Certes, c'est rigolo... dans la poudreuse.

Ce qui est moins drôle c'est quand on perd le contrôle du traîneau. Déjà qu'on n'avait pas le contrôle des chiens (ou si peu), on se sent vite seul. Heureusement, ça dure rarement plus de quelques secondes... avant la gamelle. Pas lâcher le traîneau ! C'est la consigne, sinon il se barre avec les affaires, la bouffe, il peut tomber dans un dévers, entrainer ou blesser les chiens ou quelqu'un se trouvant devant. Alors à plat ventre accroché au guidon, on gueule STOOOOOOOP ! à ces enfoirés de chiens qui continuent à courir pendant qu'on essaye désespérément de redresser l'engin renversé pour remonter dessus et freiner.

Alors le soir, après avoir nourri ces braves chiens, on s'écroulait à table. Notre guide nous préparait un petit plat remontant (tartiflette, crozets au beaufort, ravioles etc...) arrosé d'un coup de jaja, et à vingt et une heures : dodo. On demandait pas notre reste. Une belle assemblée de ronfleurs allongés sur des matelas au sol qui n'ouvraient l'oeil qu'avec difficulté à 8 h le lendemain.

A force de pelles et gamelles en tout genre, on a finit par acquérir une certaine technique. Alors on se risquait à d'autres jeux comme descendre une piste de fond damée. Très amusant dans les lignes droites, très technique dans les virages en épingle où il faut faire déraper le traîneau genre Starsky et Hutch si on ne veut pas finir dans le talus. Ca c'est dans la théorie, parce que le talus on finit toujours dedans. Et ce qui est le plus vexant c'est quand on arrive à arrêter ses chiens, qu'on remet un peu d'ordre dans le matériel et qu'on s'aperçoit que les quatre chiens nous regardent l'air de dire : bon, oh, tu te magnes un peu là ? D'ailleurs, à peine esquissé le geste de poser un pied sur les patins, les quatre dingos se mettent à tirer d'un seul coup nous arrachant des jurons qu'on ne pensait même pas connaître.

Je suis rentré pas trop cassé. Un peu abimé certes, sentant le chien et la vieille chaussette, avec une barbe de bagnard et le cheveu collé. J'ai découvert le regard profond et sage d'Archi, le poids de sa tête sur mon bras, sa puissance, sa douceur et sa docilité. J'ai versé une larme en le remettant dans sa boite sur la remorque, saleté de chien va !

J'ai aussi laissé quelque chose là-haut sur la montagne. Un peu comme une vieille peau, une défroque de quelque chose. En rentrant j'ai confirmé mon inscription à ma formation, j'ai prévenu mon employeur que je passais mes derniers mois chez eux. C'est là-haut, blotti dans mon duvet que j'ai repoussé les derniers doutes et pris ma décision.

Finalement, c'est chouette aussi les chiens...

2 janvier 2008

A cinq...

Elles étaient quatre copines. Quatre copines d'infortune qui affrontaient la vie en se tenant les coudes. Avec elles quatre, il y avait un bébé, une toute petite fille, un nourrisson. A eux cinq ils totalisaient vingt ans tout juste. Depuis quelques mois elles vivaient au milieu d'autres enfants dans les faubourgs de Katmandou. Elles étaient cinq presque inséparables, parce qu'arrivées à cinq un jour de mai. Elles venaient de différents horizons, avaient été ballotées, transportées, déplacées, bringueballées et avaient finalement échoué au milieu d'une trentaine d'autres gamins en errance qui trouvaient là un minimum de soins, de nourriture et d'attention.

Au plus chaud de la mousson, des étrangers ont commencé à arriver. Jusqu'au plus froid de l'hiver ils se sont succédés par couple, chacun tendant ses bras vers l'une d'elle. On leur avait dit qu'ils étaient leurs nouveaux parents et qu'ils prendraient l'avion un jour avec eux. Les étrangers venaient passer quelques jours puis repartaient en pleurant. La veille du départ ils répétaient bientôt, bientôt, bientôt, comme un mantra. Puis ils s'en allaient, et les filles levaient les yeux et regardaient les avions tout là-haut. Toutes les cinq allaient avoir une maman et un papa, toutes les cinq iraient en France, dans le même pays où elles pourraient se revoir.

Il y a presque un an, deux couples sont revenus. Ils ont serré très fort K. et M. dans leurs bras, et quelques jours plus tard ont embrassé les autres en disant bientôt, bientôt, bientôt. Les trois copines restantes ont beaucoup pleuré en voyant partir les deux autres qui ne savaient pas si elles devaient être heureuses de leur sort ou fondre en larme et hurler qu'elles ne voulaient pas. K. était sur mes épaules, les doigts plongés dans mes cheveux, M. dans les bras de François, tétant son pouce, ses grands yeux noirs rivés sur le visage de cet homme tout blanc qui l'emportait.

Deux mois plus tard, K. était devenue Petite Fleur et se débrouillait très bien dans sa nouvelle langue. M. crapahutait sur une moquette Genevoise et continuait à fixer ses grands yeux noirs et déterminés sur le monde. Au même moment à Katmandou un autre couple emmenait S. et répétait bientôt, bientôt, bientôt aux deux dernières, comme si ça pouvait les consoler.

Quelques semaines plus tard, un bureaucrate Parisien décidait que les conditions d'adoption au Népal ne respectaient pas la convention de La Haye et faisait un rapport en ce sens. Le rapport suivi le circuit administratif standard pour échouer sur le bureau d'un chef de cabinet quelconque qui y apposa sa signature, pour le bien des enfants.

T. et R. étaient désormais coincées à Katmandou, inadoptables, pour leur bien.

Pendant six mois, les deux familles se sont relayées pour assurer une présence auprès des deux fillettes, pour leur montrer qu'elles aussi allaient venir en France, qu'on ne les avaient pas oubliées. Un petit réseau s'était organisé autour d'elles, pour faire passer dessins, photos, cadeaux entre le Népal et la France. Un véritable pont aérien de sourires et de douceur qui pourtant ne pouvait masquer l'angoissante question : et si la procédure était cassée ? Et si la situation ne se débloquait pas ? En marge, les familles se sont regroupées et ont tenté d'alerter les opinions, les politiques, les influences. Mais l'adoption a mauvaise presse. Entre un couple qui part à l'étranger pour ramener un enfant et un kidnappeur le pas est vite franchi. Et l'actualité récente a très bien oeuvré dans ce sens.

A l'approche des fêtes nous avions peu de contacts avec les deux familles. Nous allions passer notre premier Noël de parents, eux attendraient encore pour vivre cela. Nous ne voulions pas étaler notre bonheur devant eux, aussi nous leur avions dit que nous pensions très fort à eux et à leurs filles mais ne voulions pas être trop présents. Nous avons réveillonné avec François et Sophie, les parents de M. qui maintenant sait dire non ! et trottine partout dans la maison. Petite Fleur et elle sont comme deux soeurs, c'est bon de les voir réunies de temps à autre. Et comme à chaque occasion, nous avons parlé de T. et R. et de leurs parents.

Ce matin je finissais mon thé en parcourant mes emails quand mon téléphone a sonné. C'était Chère et Tendre qui avait discuté avec les parents de S. et avait ainsi appris que T. était arrivée hier dans sa nouvelle maison et que R. arrivait la semaine prochaine. Ce Noël a donc été le premier de chacune des cinq. Deux l'ont fêté à Katmandou, les trois autres en France, toutes avec leurs parents.

Voila une année qui commence bien. Bienvenue à toi T., et à toi R. Et à très bientôt.

Et bonne année à vous. Que la vie vous soit un conte de fée...

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